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Joyeux Récits du Terroir Fougerais

Introduction

Le parler de Haute Bretagne naguère si répandu dans nos campagnes et jusque dans les vilIes a subi depuis un demi-siècle un important recul. Les jeunes de plus en plus le délaissent, seuls les anciens I'emploient encore entre eux, mais avec une certaine crainte de paraître attardés. Moins favorisé que son frère de Basse Bretagne, le gallo serait-il condamné à se réfugier dans l'ombre?

la région fougeraise n'a pas echappé à ce phėnomėne dont les causes sont multiples: la proIongation de la scolarité, l'exode vers les villes, le rôle des moyens d'intormation, l'évoIution des mœurs en ont précipité le déclin. Ajoutons qu'un injuste discrédit a étė souvent infligé au gallo par les milieux officiels désireux de préserver du patois l'unité et la pureté de la langue française... Vain prétexte qui n'empêche nullement les élèves modernes d'accumuler les fautes d'orthographe dans leurs copies, ni les discoureurs du temps présent d'offenser allègrement la syntaxe.

Le ga1lo traverse donc une crise grave. Si l'on n'y prend garde, elle ne pourra que provoquer à court terme, l'extinction du langage sėculaire transmis par les aïeux. N'a t'elle pas déjà porté atteinte à notre patrimoine cuIturel, à l'originalité de notre coin de province et à ses particularités? Des sources dinspiration ont eté taries, les études de caractères et les peintures de mœurs, précieux documents pour l'histoire, sont devenues difficiIes... les modèIes faisant defaut !... Nous ne rencontrerons donc pIus sur notre route. ces personnages pittoresques des deux sexes (des femmes surtout plus spontanées et plus loquaces que les hommes, lorsqu'elles se sentaient en confiance) qui nous contaient des anecdotes savoureuses, où la malice et la verve se donnaient libre cours, égratignant parfois au passage (qu'on _eur pardonne !...J les gens du voisinage ou de Ia parenté, faits divers de hameaux commentés non sans verdeur. événements de l'époque souvent enjoIivés, vėritable mine où l'on pouvait puiser pour alimenter un tolklore qui de nos jours se meurt.

Face à ce regrettable état de choses. il nous faut heureusement constater une louable réaction qui depuis quelque temps se précise, et qui a fait surgir des motifs d'espoirs : des professeurs d'Universitė, des enseignants. des historiens ou de simples chercheurs. amoureux du passé, n'ont-ils pas dėcidé d'unir leurs efforts pour Ia survivance du gallo. pour sa remise en valeur dans la sociėté...

Des ėtudes sont en cours pour Ia constitution d'un glossaire. Des recherches sont effectuees pour recueillir le pIus possible de textes : contes, récits, chansons, productions scėniques, enregistrements. Des rencontres sont prévues pour favoriser 1es ėchanges entre sympathisants et la diffusion de la littérature. Ajoutons qu'une association des Amis du pays gallo a été formée et qu'elle a recueilli des adhésions nombreuses.

Notre Société archéologique et historique se devait de participer à ce mouvement prometteur: N'a-t-elle pas créé l'an dernier parmi ses membres le cercle d'ėtudes Amand Dagnet, du nom du célèbre folkloriste, enfant du Coglais, qui a si bien chanté les bords du Couesnon et ses 1égendes.

Pour ma part, répondant au vœux de mes collègues, je publie Les joyeux récits du terroir fougerais. Sans doute les acteurs présentės au cours de ces pages ont depuis longtemps quittė la scène de ce monde, et il serait vain de chercher à les identifier. Mais du moins l'imagination du lecteur aidant, pourront-ils quelque peu revivre!

J'ajouterai que les iIlustrations des textes ont ėté confiées à notre compatriote Mixi Bérel originaire de Mellé. Ce coteau granitique d'où il prit son vol, dès sa jeunesse en direction des horizons parisiens où son talent excelle. Je le remercie de m'avoir apporté au nom de l'amitié le concours de son crayon alerte...

Puisse cet ouvrage divertir ses lecteurs et servir en même temps la cause du gallo.

J.P.